L’atelier de découverte de la technique de greffage « en écusson » a rassemblé une bonne douzaine de personnes. Hugo (de Vergers Urbains) nous a donné quelques éclairages théoriques et a répondu à nos nombreuses questions, puis nous nous sommes rendus au coin pépinière du verger pour la mise en pratique.
Les porte-greffes ont été plantés en avril dernier. Ce sont des arbres jeunes, dont le « tronc » mesure 1 à 2 cm de diamètre. Ces arbres ont été sélectionnés pour que leurs racines s’adaptent bien au terrain et aux conditions climatiques (ici, des « M9 »). La date de l’atelier a été choisie pour que leur écorce soit encore souple.
La greffe se fait à une dizaine de cm du sol – le plus bas possible mais pas trop pour ne pas enterrer le point de greffe à la plantation. Sinon il y a risque que des racines se développent à partir du greffon, au détriment de l’arbre greffé. On supprime les feuilles éventuelles sur une bonne dizaine de cm.
On commence par s’occuper du porte-greffe. On choisit un endroit où l’écorce est saine et ne comporte pas de bourgeon. Avec un couteau à greffer (greffoir) on pratique une incision en T d’environ 1 cm sur 3.
Avec la spatule du couteau on ouvre délicatement la partie verticale du T en décollant l’écorce.
Préparation du greffon : on choisit une branche vigoureuse de l’arbre que l’on souhaite reproduire. Avec un sécateur, on coupe les feuilles en laissant les pétioles (les deux petites feuilles à leur base). Chaque bourgeon à la base des pétioles peut être utilisé comme greffon, mis à part ceux trop près des extrémités. Nous avons choisi des rameaux de pommiers boskoop bien installés dans le verger.
Délicatement, avec la partie tranchante du greffoir ou avec un cutter, on va découper un bourgeon avec un peu de bois : c’est l’écusson : on passe la lame sous le bourgeon, assez profond de manière à bien prélever la totalité du bourgeon. C’est ce bourgeon qui va donner naissance à un arbre entier !
En prenant l’écusson par les pétioles, on va l’insérer dans la partie verticale du T à l’aide de la spatule. On n’attend pas trop car l’écusson sèche vite !
On recoupe la partie haute de l’écusson exactement sur la barre horizontale du T de manière à ce que les « plaies » des deux écorces se superposent. Puis on ligature avec un film étirable gras pour bien plaquer l’écusson contre la partie dénudée du porte-greffe .
Rendez-vous au printemps pour les résultats… Si la greffe a pris, on coupe le porte-greffe une dizaine de cm au-dessus du point de greffe et on enlève les feuilles sur la partie restante du porte-greffe. Cette petite tige restante pourra servir de premier tuteur au greffon en développement. Plus tard on coupera le porte-greffe à ras et on mettra un tuteur plus solide. On pourra planter l’arbre à l’endroit qui lui est destiné.
Questions/réponses
Quelle est la différence entre l’arbre issu d’un pépin ou d’un noyau et un arbre greffé ?
Si on sème des pépins ou des noyaux, dans la très très grande majorité des cas, on obtient un arbre avec des fruits différents du fruit d’origine, selon le jeu de la génétique. Et il faut être très patient, attendre entre 5 et 10 ans, pour pouvoir goûter aux premiers fruits… Ce n’est donc pas en semant les pépins de ces délicieuses poires Guyot que vous aimez tant que vous pourrez satisfaire votre gourmandise! En revanche, le semis est utilisé pour créer de nouvelles variétés de fruits : on sème en ligne une grande quantité de noyaux ou de pépins … on attend quelques années pour la première récolte : dans plus de 90 % des cas on obtient des fruits sans intérêt, voire immangeables. Mais parfois le hasard fait bien les choses et on obtient un fruit merveilleux. On appelle cette méthode : le « semis chanceux ». Aujourd’hui, l’analyse génétique des graines permet de faire un pré-tri (prédire le taux de sure, la résistance à certaines maladies, la taille du fruit…) mais le passage par l’étape du semis est incontournable pour obtenir de nouvelles variétés.
C’est là que la greffe entre en scène: elle permet de dupliquer à l’infini cet arbre qui donne les fruits merveilleux. Et ce à partir d’un simple fragment de rameau. Ce fragment s’appelle un « greffon » (un « écusson » dans le cas de la greffe du même nom). Un autre arbre , dit porte-greffe, fournira les racines et la sève brute nécessaires à la croissance du greffon. Pour que ça fonctionne il faut que les tissus du porte-greffe et du greffon situés sous l’écorce se soudent. On parle de reproduction végétative.
Comment on choisit le porte-greffe ?
La greffe se pratique depuis la nuit des temps… Au début on utilisait des arbres sauvages. On sectionnait leurs racines pour les affaiblir. Les porte-greffes actuel sont des arbres (pommiers, poiriers, cerisiers, amandiers, aubépine, merisiers…) qui ont été sélectionnés pour leur vigueur pas trop forte (on souhaite obtenir des fruitiers pas trop haut et productifs, avec des racines assez superficielles pour bien répondre à l’arrosage et aux engrais). Ils sont produits par marcottage en pépinière. De nombreux catalogues donnent les associations les plus favorables entre greffon et porte-greffe.
C’est quoi une reproduction par marcottage ?
C’est quand des racines se développent à partir d’une branche qui est encore attachée à l’arbre. On plie une branche jusqu’au sol et on l’enterre. On attend que des racines apparaissent à l’endroit enterré et (si) quand elles sont assez vigoureuses on sépare le rameau marcotté de l’arbre parent. (un peu comme ce qui se passe pour les fraisiers, venez voir au verger!) L’arbre obtenu est exactement identique à l’arbre parent.
Biblio
Les ouvrages sur le sujet ne manquent pas. Les techniques de greffe sont des techniques éprouvées : vous trouverez les mêmes techniques quelque soit l’auteur. La préférence d’Hugo :
Evelyne Leterme, Le greffage et la plantation des arbres fruitiers, éditions Rouergue.
Une recherche internet « pourquoi greffer » donne de nombreux résultats. Parmi ceux-ci, une explication simple et bien illustrée sur le site de l’association montbéliarde « vergers vivants ».
On peut aussi se référer au site de l’association des croqueurs de pomme.